Comment on fait une BD ? Pourquoi ça coûte ce prix-là ? C’est quoi, les métiers de l’édition ? Pour répondre à toutes ces questions, on va prendre un exemple, qui sera plus parlant.
On va vous parler de Waldo, de Lorraine Les Bains, de la conception à la réception chez les lectrices et lecteurs.
Au commencement il y a… L’idée. Faire une BD, ça démarre par une idée !
Dans le cas de Waldo, ça commence par un dessin. Lorraine, en vacances dans le coin, entame un carnet de voyage des maisons d’Andernos-les-Bains en 2012. Deux jours après, elle dessine cette maison et c’est le déclic : “Là, j’ai compris qu’il ne fallait plus faire que ça : des dessins de maisons, partout où j’irai. Des maisons qui me feraient rêver, dans lesquelles je ne vivrai jamais.”. Elle dessine alors pleins de maisons, jusqu’à celle-ci en 2015, à laquelle elle ajoute une petite bulle, imaginant la vie des chanceux qui habitent cette magnifique villa. Là encore, nouvelle idée : Lorraine imagine une histoire sur ces maisons, sur ce qui se passe derrière les façades de ces lieux de vie inaccessibles. Waldo sera une BD où on ne voit pas les personnages, que leur maisons. L’histoire, qui met en scène un psychopathe-serial-killer-voyeuriste, questionne le voyeurisme de Lorraine à l’égard de ces maisons, et celui le·la lecteur·ice. En cachant les personnages, leur voyeurisme est d’autant plus stimulé. Ça y est, Waldo est sur les rails ! Lorraine va maintenant élaborer un scénario et commencer l’écriture et le dessin de la BD, pour l’instant toute seule, afin de déposer par la suite un projet d’édition auprès de différentes maisons.
Comment ça se passe en maison d’édition ? Les projets arrivent par mail et les éditrices et éditeurs se réunissent lors d’un comité éditorial afin de décider quelles BD seront éditées et qui sera en charge du projet.
Dans le cas de Waldo, c’est Lorraine qui nous a présenté elle-même son projet par mail en avril 2018. Avec pleins, pleins de maison dedans, évidemment ! C’est Charlie, notre éditrice, qui s’est chargée de travailler avec Lorraine sur Waldo. Le travail avec cette autrice consiste en de longs échanges et des aller-retours autour du scénario et du dessin. L’idée, c’est d’améliorer ce qui pourrait freiner la compréhension des lecteur·ices. On retravaille le texte pour que le scénario soit plus lisible, on fait des suggestions de découpage des cases, de développement de personnages… Par exemple, comme il n’y a pas de personnage dans Waldo, l’idée est venue de changer la couleur des bulles pour mieux identifier qui parlait à quel moment, et caractériser des personnages invisibles. En parallèle, avant la fin de l’écriture de la BD, l’éditrice prépare l’impression : elle évalue quel papier, quel profil colorimétrique et quel format de couverture seront utilisés, et combien d’exemplaires seront tirés. Elle envoie ces informations à l’imprimeur, qui est alors en mesure de lui fournir une estimation du coût de fabrication du livre. C’est en ayant le coût de fabrication qu’on peut évaluer combien va coûter le livre. Quand les devis sont sortis et que l’éditrice a une estimation du prix final du livre, elle se tourne ensuite vers le diffuseur/distributeur. C’est le moment de présenter le projet aux représentant·es qui en assureront la diffusion. Pendant 3 mois, pendant les phases de finalisation du livre, les représentants font la tournée des librairies pour présenter le projet et placer le livre, ce qui signifie “lui assurer une place en boutique”. Les libraires commandent un certain nombre de livres auprès du diffuseur, en estimant combien ils pourront en vendre. Le diffuseur nous retourne ensuite le chiffre total d’exemplaires commandés.
Ce chiffre nous permet d’ajuster nos tirages et de passer commande auprès de l’imprimerie. Nous, on en profite pour commander aussi pour nos services presse, pour notre librairie en ligne et puis pour nos auteur·ices.
Dans le cas de Waldo, les librairies ont adoré l’idée, et le nombre d’exemplaires envisagé a dû être augmenté ! Vous vous doutez que c’est une bonne nouvelle pour tout le monde. Lorsqu’on sait combien d’exemplaires on va imprimer, on peut enfin passer à l’élaboration d’une maquette finale du livre. C’est à ce moment qu’interviennent notre correcteur qui relit nos BD pour enlever toutes les coquilles, et également les graphistes en charge de l’élaboration de la maquette, avec les fonds perdus, les numéros de pages…
C’est un travail long et fastidieux, qui demande beaucoup de passages et d’aller-retour.
Enfin, la maquette part à l’imprimerie ! Elle va encore faire quelques aller-retours pour l’ajustement des parties techniques (vérification des profils colorimétriques, des noirs et des couleurs, calage des dos, ajustements et centrages…). Et on arrive au Bon à Tirer final donné par l’imprimeur. Après ultime validation de ce BAT par nous et par Lorraine, Waldo va être imprimé !
Et là… On attend. On attend en moyenne 5 semaines.
Pendant ce temps, on en profite pour prévoir la com’, l’organisation de dédicaces, quelques événements liés à la sortie de la BD… C’est le moment où on commence à vous parler de sa sortie et lancer les préventes, par exemple.
Quand Waldo est imprimé, une partie arrive chez nous, pour envoi chez Lorraine, aux journalistes et pour la vente directe via notre librairie en ligne, et l’autre partie va chez le distributeur qui se charge de l’acheminer en librairie.
L’étape suivante, eh bien… C’est que vous ayez le livre entre les mains ! C’est à vous de jouer, quoi !
Dans le cas de Waldo, vous avez dévalisé les librairies, et on l’a réimprimé sous deux mois !
Ce livre a eu un beau succès, couronné un an plus tard par l’obtention du prix Artémisia de l’originalité, en 2020 ! C’est super, parce que ce prix continue de faire vivre le livre et donne de la reconnaissance au travail de Lorraine.
Et voilà, c’était l’histoire de Waldo, de la première idée de Lorraine à l’arrivée entre les mains de lea lecteurice. On espère que ça vous a plu, et que vous avez appris des choses sur la chaîne du livre.
Si Waldo a piqué votre curiosité, il est toujours possible de le retrouver sur notre librairie en ligne ! Au programme : des maisons et une histoire de meurtre. Garanti sans personnage ! Et nous, on n’a pas fini de vous parler de Lorraine les Bains et ses maisons, puisqu’elle sort Maisonologue le 14 mai prochain chez nous ! Et pour les plus jeunes, elle sort aussi chez nous La Girafe qui rentrait mal dans sa case, un jeu de format sur le livre, drôle et anticonformiste, à partir de 6 ans.